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Pollock, Le Diable, tout le temps

L’Ohio comme une flaque de boue et de sang, perdue dans une Amérique qui se vautre dans ses traumas, qui cultive sa violence, son déni de violence. Dans l’évangile et dans les armes. Avec cette matière noire de la crasse qui se confond aux ombres de la nécrose. Sous le vernis, la pourriture qui s’installe : ça pourrit silencieusement dans des bibles aux pages vides, délavées par la poudre. Il faut un sauveur pour ne pas être sauvé, pour se donner tout entier à la figure du mal. Chercher à briser ce qui espère dans les corps, couper les ailes de l’oiseau et le regarder agoniser pour se venger de ne pas pouvoir voler. C’est un portrait de l’abandon, dans ce creux de la pauvreté où la haine se fait ordinaire. Et pour seule figure de la résistance, celle d’une providence par la mort, qui maquille la justice en une fatalité qui ressemble à un luger allemand.

Réf.

Donald Ray Pollock, Le Diable, tout le temps, Albin Michel, 2012.

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